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LETTRE N°37

Ces dix derniers jours nous ont mis à rude épreuve, Paz et moi : Paloma se réveille vers six heures du matin et s’endort vers neuf heures du soir ; tension, fatigue, manque de temps pour tout, y compris pour mettre en place les solutions de contournements aux handicaps de Paloma en constante progression comme cette “Loveuse Zoé” achetée pour sortir notre fille de son lit médicalisé et de son fauteuil roulant.
Le plus douloureux reste la perte progressive de la parole et une surdité quasi totale.
“C’est horrible de ne pas pouvoir parler… Pourquoi je ne peux pas parler ? Quel est le problème ? Pourquoi on ne fait pas une IRM ?” me demandait-elle il y a quelques jours à peine.
Comme je lui dis que je suis désolé et que je lui demande pardon, elle me répond : “je suis habituée à la maladie.”
Paz lui a confectionné un mélange d’abécédaire et d’imagier et lui a enseigné quelques gestes issus de makaton, langue des signes simplifiée.
Mais Paloma s’inquiète de ses vacances familiales à Hendaye au mois d’août, si elle ne parle pas. Mais si la tumeur continue sa progression, mathématiquement, ce sera le moindre de nos soucis. Car combien de temps “Pépé” peut-il encore s’étendre sans atteindre ses fonctions vitales ?
À moins d’un miracle, Paloma ne marchera plus jamais. Elle sera bientôt complètement incapable de communiquer avec le monde extérieur alors que son monde intérieur bouillonne toujours autant ; à moins d’un miracle, elle ne retournera ni à Hendaye, ni au Touquet (en juillet) ; elle ne fera pas sa rentrée au collège de son frère en septembre prochain ; à moins d’un miracle, elle sera morte avant l’été.
Mais je ne suis pas un mathématicien, je suis un littéraire. Je suis celui qui crois. Car il suffit d’un tout petit miracle pour que Paloma recouvre la santé. On n’en parlera à personne, on le garde entre nous. Et puis, qui nous croirait ? On dirait qu’on avait tout inventé, qu’elle n’a jamais été malade, que c’était une de ces farces idiotes dont on ne sait pas comment se sortir et qui ferait une si bonne comédie avec Danny Boon ou Benoît Poelvoorde…
Elle ne veut plus que son frère Bruno aille au collège pour qu’il reste auprès d’elle.
“Alors ça y est, je suis muette”. De sa main tremblante, elle a désigné lentement les lettres qui forment cette phrase. Je les ai retranscrites sur un tableau avec des lettres aimantées achetées en urgence ; ce constat l’a plongée dans une grande détresse.  Nous faisons de notre mieux, Paz et moi, pour la distraire en dépit de toutes les facultés qu’elle perd, pour lui donner envie de s’accrocher, pour donner un sens à ses jours sans prolonger cruellement une longue agonie, tout en continuant de croire que la guérison est possible, et pour sortir de ses pensées ce “je préfère mourir” qu’elle exprimait ce matin au réveil. Nous jouons aux mimes, au pendu… Nous arrivons encore à la faire rire, nous le percevons dans le plissement de son œil droit…
Merci, Isabelle, pour ces paroles réconfortantes qui me semblent tellement vraies : “il est certain que, en dehors de sa souffrance, elle est venue apprendre l’amour et le transmettre.”
Merci, Anna et Sienna, fidèles amies de son enfance dans les Asturies, pour votre laurier béni du Dimanche des Rameaux et vos bougies allumées pour elle.
Il me semble que dans une certaine mesure – et je déteste cette idée – cette situation nous isole et que personne ne peut comprendre ce que nous endurons, même les plus proches, à part les parents qui sont passés ou passent par cette même tragédie.
Merci, Christelle, pour ton aide et ton association Sous ton aile, pour ce trèfle à quatre feuilles que tu as trouvé alors que nous parlions. D’autres amis proches en ont trouvé depuis et les offrent à Paloma. Je prie pour ta petite Ambre, qui a succombé en juillet 2017 de ce même GITC (DIPG). Tu es lumière.
L’invitation à nous apporter des plats cuisinés a changé notre quotidien et nous prisons aussi ces visites furtives qui nous permettent de retrouver un peu de vie sociale. Merci, Marie, pour votre eau de Fatima : Paloma fait son signe de croix avec tous les soirs.
Pardon à vous tous de ne pas répondre individuellement à vos messages, pardon en particulier à toi, Alex, fidèle depuis tant d’années, et qui a tenté à quatre reprises de me téléphoner ces derniers jours. Merci pour vos cartes et petits cadeaux qui nous arrivent plusieurs fois par semaine. Embrasse bien fort ta femme et vos deux adorables filles…
Je crois que Dieu est Tout-Puissant et qu’un miracle est possible. Je ne peux pas m’empêcher de penser que s’il n’arrive pas, c’est que je  n’aurai pas su faire ce qu’il fallait pour le déclencher.
Le mois de mai est celui de la sensibilisation aux tumeurs/cancers du cerveau. C’est aussi, pour les chrétiens, le mois dédié à la Vierge Marie. Plus que jamais, je voudrais vous demander, en fonction de vos croyances, de votre religion, de vos convictions, et si vous n’avez rien de tout cela, ne serait-ce que parce que la souffrance d’une enfant de dix ans vous révolte, de souhaiter sa guérison. Que ceux d’entre vous qui le peuvent implorent la Sainte Vierge d’intercéder auprès de son Fils pour la guérison de Paloma. Si vous avez une icône ou que vous passez devant une église durant ce mois de mai, arrêtez-vous un instant, et priez. Vous pourrez ainsi vous dire que vous avez contribué à un petit miracle, et parce que, comme l’a écrit Georges Bernanos : “La prière est, en somme, la seule révolte qui se tienne debout.”
Vous pouvez poster vos photos sur notre page Facebook ou les envoyer à ma sœur Aurélia (amalahieude@gmail.com) qui se fera un plaisir de les poster si vous n’avez pas Facebook.
A fide sanatio.

1 commentaire

  • Sandrine Lise mai 2, 2019 - 2:14

    Bonjour Un gros bisous à Paloma nous pensons forts à elle. Une gros pensée à la famille. Sandrine Lise agent école Jules Michelet

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